Cette saga des plus beaux sites de plongée en mer Rouge égyptienne se poursuit par la description d’un autre lieu phare du large : Les Brother’s Islands, qui enchanteront les amoureux d’aquarelles récifales et pélagiques. Mais la richesse des fonds marins n’a d’égale que… la difficulté des plongées ! Suivez-moi sur ce site sauvage de légende, perdu quelque part, au milieu de la mer Rouge.
LOCALISATION
Al Akhawein – « Les deux frères », en égyptien, ou « Brothers », en anglais – sont deux îlots qui ont surgi du fond de la mer Rouge à 84 km de la côte et parallèles à elle, en face de la ville de pêcheurs de Quseir. Tout comme Daedalus Reef, « les deux frères » sont des montagnes sous-marines qui ont poussé au milieu de la mer Rouge grâce à une résurgence volcanique entraînée par la subduction des plaques continentales arabique et africaine, sur la faille du Rift. Facilement accessibles d’Hurghada, de Safaga ou de Marsa Ghalep, c’est lors de croisières « BDE » (Brother’s island, Daedalus reef, Elphinstone), « Nord-Brothers » ou simplement « Brothers » que vous pourrez vous y rendre.
HISTOIRE
Les Brothers ne sont plus à présenter ! Suprême site de plongée pour le pélagique depuis plus de vingt ans, les plongeurs s’y rendent constamment de mars à décembre par tous les temps. A chaque saison sa spécialité ! Big Brother abrite un phare de 31 m de haut d’origine anglaise. Il fut construit en 1883, puis rénové en 1993. Il n’était muni à ses débuts que d’une lampe à pétrole et d’un système de lentilles complexes. Puis il a été automatisé. Y résident quatre militaires et un ingénieur.
Small Brother n’est recouvert que de petits monticules de pierres, qui, pour les marins superstitieux, correspondraient à des sépultures. Légende ou réalité, il est interdit d’y grimper.
TOPOGRAPHIE
Les deux îles sont espacées d’environ un mile nautique. Elles se rejoignent par 400m de fond.
BIG BROTHER
L’île de Big Brother mesure 300 m de long environ. Un platier récifal contourne l’intégralité de l’île et s’étend sur une cinquantaine de mètres au Nord. Un tombant surplombe les versants Nord, Est et Ouest avec un plateau de corail au Sud. Deux épaves gisent sur ces tombants. L’une sur la pointe Nord, le Numidia, et l’autre, l’Aïda II, sur le tombant Nord-ouest.
LES PLONGÉES SUR BIG BROTHER
– Le plateau Sud
Généralement, les bateaux de plongée sont amarrés entre le ponton du phare et la pointe Sud du platier. Le plongeur s’immerge donc récif à main gauche et il descend progressivement le long du tombant pour atteindre le plateau, vers 30 m de fond. Se méfier du courant qui le coupe parfois en deux, du nord-est vers le sud ouest ou inversement. Sur ce plateau, entre 30 et 45 m sont posées trois boules de corail sur lesquelles on trouve des stations de nettoyage, ces territoires spécifiques où vivent des labres nettoyeurs ayant pour rôle principal le déparasitage des poissons pélagiques et autres.
L’attraction essentielle de cette plongée est la rencontre avec le requin renard pélagique (Alopias pelagicus). Ce requin est dit hygiénique, car il a un besoin permanent de se faire nettoyer avant de partir chasser. En effet, c’est grâce à sa robe argentée qu’il hypnotise les bancs de sardines ou de fusiliers en tournant autour d’eux. Une fois la boule de poisson bien compacte, il la frappe de sa longue queue et n’a plus qu’à engloutir ces proies assommées. On en dénombre six différents – de sexe et de taille – qui se promènent entre les deux îles.
On peut également rencontrer des requins gris de récif (Carcharhinus amblyrhinchos) en patrouille, le long du plateau et du tombant. Après avoir exploré le plateau, il faudra faire demi-tour à 100 bars ou lors des premiers paliers. Il faudra prendre le récif à main droite pour revenir vers le bateau. Le tombant est tapissé d’alcyonnaires, très souvent animées de poissons flûtes, de gros napoléons, de barracudas et de thons de passage dans le bleu.
– Le Numidia
Il faut que les conditions météos soient optimales pour proposer cette plongée. En effet, l’épave est posée sur la pointe nord de l’île où se brisent les vagues. Lorsque le vent souffle fort et que le ressac est important, il est dangereux de s’y immerger car le platier n’affleure pas la surface du récif mais tombe par dix mètres de fond. Il faut donc s’immerger en flottabilité négative, le gilet complètement vidé, afin de ne pas se faire prendre par la houle sur le platier ! De plus, si le courant est violent, les plongeurs peuvent aisément se faire emporter dans le bleu. Le Numidia est donc une plongée qui se mérite !
Ce cargo anglais de 130 m de long et de 6 400 tonneaux frappa le Nord de l’île en 1901. Il repose aujourd’hui verticalement entre 10 et 84 m. L’avant du bateau a été détruit par les vagues au fil du temps, mais l’arrière reste en bon état. La partie médiane est endommagée mais splendide tant elle regorge de vie ! Tout de suite après votre immersion, rejoignez l’épave vers les 15 m pour éviter le ressac. Là, stupéfait, il vous est parfois difficile de réaliser que vous êtes sur le dessus du bateau tellement il y a de parties concrétionnées. Votre itinéraire dépendra du courant. Dans le bleu, bancs de thons, carangues, barracudas, requins gris de récif en stationnaire. S’il y a de la houle, il est recommandé de ne pas se balader dans l’épave de peur de se blesser en heurtant la ferraille. Sinon vous pouvez entrer par 38 m dans la cale moteur puis remonter le long des infrastructures internes, vers 20 m.
Les coursives, impressionnantes avec leurs bossoirs, sont elles aussi recouvertes d’alcyonnaires de toutes les couleurs animées par le balai incessant des anthias. Prenez le récif à main gauche, si c’est possible, en fonction du courant. Parfois, il faut appuyer sur les palmes sur quelques mètres pour passer la pointe et ensuite dériver tranquillement en direction de l’Aïda II, un transporteur de troupe égyptien qui coula en 1957 et que vous survolerez quelques minutes plus tard.
L’Aïda est nettement plus abîmée et profonde – son sommet se trouve à 30 m – que le Numidia, mais elle ne comporte pas un intérêt suffisant pour lui valoir d’y plonger pour elle seule. Vers 15 m au-dessus de l’épave, vous pourrez contempler les moteurs qui sont encore posés sur le platier, au milieu des acroporas. Plus loin, vous sortirez votre parachute dans les 50 bars pour faire surface à 30, avant que les zodiacs ne viennent vous récupérer.
– La dérivante Sud-est
En fonction du succès de vos plongées sur Big Brother, vous pouvez aussi essayer une dérivante le long du tombant Est. À quelques minutes du bateau, le plongeur est largué un peu avant le milieu de l’île, en immersion négative si c’est possible, en raison des vagues. En prenant le récif à main droite, vous dériverez le long du tombant, qui est magnifique, couvert de vie, avec son mélange de gorgones, d’alcyonnaires et de faune corallienne en tout genre.
Il faut veiller à toujours jeter un coup d’œil vers le bleu pour ne manquer aucun passage éventuel de poissons pélagiques. En fin de journée, par exemple, des thons albacores sillonnent ces eaux…Quelques dizaines de minutes plus tard, vous rejoindrez le plateau sud. Si votre déco et votre conso vous y autorisent, refaites un passage au-dessus des stations de nettoyage, on ne sait jamais ! Retour dans la zone du bateau après une heure de plongée.
SMALL BROTHER
L’île de Small Brother est nettement plus petite que son grand frère. Elle mesure une centaine de mètres à peine. Un très long platier immergé s’étend au nord de l’île sur une centaine de mètres et surplombe une petite pointe corallienne 45 m plus bas. On retrouve un tombant sur les versants Est, Ouest et Sud.
LES PLONGÉES SUR SMALL BROTHER
– La pointe Nord
Comme pour l’épave du Numidia, les conditions météos doivent être optimales pour faire cette plongée. Une immersion rapide gilet vide jusque vers les 15 m de profondeur est obligatoire pour éviter de se faire traîner par les vagues et la houle sur le platier. Une fois positionné sur le tombant Nord, il faut descendre sur les 35 m au-dessus de la marche sur laquelle se trouve une station de nettoyage. Avec de la chance, il est possible de croiser des requins gris en stationnaire, des requins renards ou des requins marteaux solitaires. En levant la tête, vous verrez les barracudas orientés face au courant et les thons et les carangues se promener de versant en versant. En vous retournant vers le tombant, la paroi semble bouger, tellement elle regorge de vie. Une colonie de poissons papillons cochers de l’océan Indien y réside. Prendre le récif à main droite en fonction du courant et revenir tranquillement le long du tombant. En fin de plongée, vous survolerez une forêt de gorgones, avant d’atteindre les lignes d’amarrage de votre bateau.
– Tombant Ouest
Le point de largage est le même que pour la pointe Nord. De la même manière, restez sur la marche tant que c’est possible pour y croiser du pélagique. Prendre ensuite le récif à main gauche et dériver en direction du bateau. La paroi est plus accidentée qu’à l’Est, avec des surplombs et des anfractuosités. Le chemin du retour est souvent plus court qu’en passant par l’Est.
– La forêt de gorgones
En fin de journée, le courant vient souvent se briser sur la partie Sud-Est de Small Brother. À cet endroit entre 17 et plus de 50 m de profondeur, se trouve une immense forêt de gorgones. Prendre le récif à main droite. Sur votre route, il est possible de croiser du requin gris de récif, du requin renard et parfois même un requin océanique sous le bateau. Très beau contraste, simple et sans efforts, pour finir une journée bien remplie.
À VOIR SUR LES BROTHER’S:
Une diversité pélagique et benthique extraordinaire ! Ces deux sites sont mondialement connus pour leur faune pélagique, à commencer par les requins. Il n’existe que très peu d’endroits au monde où il est possible de plonger avec des requins renards pélagiques. Les Brother’s en font partie ! On ne dénombre pas moins d’une dizaine de requins gris différents, quelques requins marteaux solitaires et avec de la chance, des requins océaniques. Quelques mantas y séjournent également quelques mois, entre juin et septembre. Des thons à dents de chien, des thons albacores, des barracudas, des carangues, des napoléons, des murènes, des scorpionidae, il y en a partout et pour tous les goûts ! Entre gorgones gigantesques et alcyonnaires de toutes les couleurs, les amoureux de corail ne seront pas déçus eux non plus.
INFOS PRATIQUE :
– Accessibilité : En croisière uniquement. Au départ de Sharm El Sheik, après une longue navigation vers le sud, d’Hurghada, de Safaga ou de Marsa Galep, sur les circuits croisière Triangle d’Or (BDE), Brothers, Nord-Brothers et Brothers-Sud.
– Niveau de plongée : Un niveau 2 confirmé avec une cinquantaine de plongées (ou PA40) ou Advanced Open water diver avec la spécialité Deep Dive. Connaître correctement l’utilisation de son ordinateur de plongée, surtout lorsque vous rentrez dans les paliers. Connaître parfaitement son équipement.
– Difficulté des plongées : Les plongées au Nord des îles requièrent une totale autonomie même si vous êtes encadrés par des guides qui connaissent le site. Connaître parfaitement son équipement et avoir un binôme de confiance. Prendre en compte trois facteurs très importants, autonomie en air, orientation, décompression, primordiaux pour la sécurité de la plongée. Attention aux violents courants d’arrachement ou descendants, de même qu’aux excursions dans le bleu. Il est parfois judicieux d’annuler les plongées pour la sécurité des plongeurs. Un parachute de plongée avec dévidoir est conseillé en cas de dérive au large, compte tenu de la profondeur.
– Taxes : Toutes les îles égyptiennes appartiennent à l’Armée. Vous aurez donc à payer une taxe marine d’une centaine d’euros pour pouvoir plonger sur ces sites du large – soit inclus dans le prix de votre séjour, soit à régler sur place.
– Shopping : Vous pourrez en plus de vos souvenirs sous-marins rapporter de votre séjour un ou plusieurs T-shirts à 10€ que vous ne trouverez que sur place, exclusivement !
– Meilleures périodes : Les Brothers sont accessibles toute la saison, de mars à décembre. Les poissons que vous pourrez croiser sous l’eau dépendra du moment de la saison. À l’époque où il y avait encore beaucoup de requins océaniques (Carcharhinus longimanus), la période optimale était octobre et novembre. Mais depuis quelques années, ils sont devenus plus rares. Les requins gris de récif et les requins renards, sédentaires, sont quant à eux présents toute l’année.
Steven Surina
Steven Surina est moniteur de plongée en mer Rouge. À ce titre, depuis une décennie, il accompagne les croisières le long des côtes égyptiennes, soudanaises et érythréennes. Il a travaillé en partenariat avec la maison d’édition italienne “Magenes Editoriale” sur le projet d’un recueil de sites de plongées sur toute la mer Rouge égyptienne en tant qu’auteur et illustrateur. Il rédige un mémoire sur le comportement des requins océaniques en 2008 et fait distribuer dans les écoles égyptiennes des fascicules interactifs sur la protection et la préservation des requins.
Il participe en compagnie du Dr Erich Ritter à une série de séminaires. A l’issue de ces mois de travaux et d’expérience communes avec la Shark School d’Eric Ritter, il lance ses propres conférences en 2009. C’est ainsi qu’il crée, en 2010, Shark Education qui propose des séjours plongée requin dont l’objectif est d’aider à mieux les connaître et les comprendre.
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Merci ChouChou pour ce compte rendu 😉
En ce qui concerne la L34, fait vite on t’attends ->
Exocet LA Croisiere plongee en mer Rouge
Bizs