Début octobre, le rêve des archéologues du DRASSM prenait forme : explorer enfin l’épave mythique de La Lune avec des moyens technologiques exceptionnels, en collaboration avec la Marine Nationale et avec Dassault Systèmes. Le but, ramener suffisamment d’informations pour pouvoir modéliser l’épave en 3D, et découvrir enfin les secrets de « L’épave cachée du Roi Soleil. »
PERMETTRE DES PLONGÉES VIRTUELLES
La difficulté d’accès à l’épave empêchait jusque là les chercheurs d’exploiter les précieuses informations cachées à bord de la Lune. Le but de la campagne, outre le fait d’accéder directement au site pendant quelques jours à l’aide du scaphandre de la Marine, était donc aussi et surtout de ramener suffisamment de matière pour pouvoir reconstituer le site en 3D : l’avantage, pouvoir ensuite travailler sans contrainte, sans limite technique, afin qu’archéologues, historiens, cartographes, puissent visiter l’épave de La Lune sans plonger ! Cette modélisation permettra aussi de mieux préparer d’éventuelles plongées bien réelles sur le site dans l’avenir. On peut aussi imaginer que cela permettrait aussi de faire intervenir des robots téléopérés, qui pourraient collecter plus facilement les objets à remonter. Et ce qui est fait aujourd’hui sur La Lune, véritable fouille expérimentale, pourrait ensuite ouvrir la voie à d’autres chantiers : que ce soit en Méditerranée ou ailleurs, nombre d’épaves historiquement capitales restent inexplorées, faute de moyens d’accès.
UN NAVIRE MYTHIQUE POUR LES ARCHÉOLOGUES
Le navire du roi Soleil est pour les archéologues, depuis près de 20 ans, une référence, un but. Découvert par hasard par le sous-marin Nautile en 1993 au large de Toulon, une première expertise avait été menée avec Ifremer, mais sa profondeur le rendait inaccessible pour une fouille complète, et les spécialistes continuaient à rêver à l’une des épaves les plus importantes et les mieux préservées au monde concernant cette période de notre histoire : elle a sombré en quelques minutes, entraînant avec elle près d’un millier d’hommes, toute son artillerie, et tous les équipements que pouvait porter un navire de guerre de l’époque. Pour les spécialistes, une mine d’informations, un témoignage unique qui va enfin devenir accessible.
VICTIME INDIRECTE DE LA PESTE
En mauvais état, le navire de retour de la côte Algérienne se voit refuser l’accès au port de Toulon : on craint qu’il n’apporte la peste, et on l’oblige à rester en quarantaine à proximité de l’île de Porquerolles. Le bateau prend l’eau de toute part, mais un expert dépêché à bord le juge capable d’ »encore faire le tour du monde ! « Un coup de mer vient très vite prouver le contraire. Selon le témoignage du Duc de Beaufort, cousin du roi qui croise le navire en rentrant d’Alger, «La Lune coula comme un bloc de marbre». Une centaine d’hommes vont réussir à gagner Port-Cros, où la majorité va mourir de faim : il n’y aura en tout qu’une vingtaine de survivants d’après les historiens.
UN DOCUMENTAIRE EN DÉCEMBRE SUR ARTE
Plus de trois siècles après le naufrage, l’épave devient enfin accessible. Aux chercheurs, bien sûr, mais aussi au public, puisqu’un documentaire a été tourné par Grand-Angle Production au cours de la mission. De gros moyens, des robots « éclairagistes », des caméras 3D : le film de 90 minutes, réalisé par Pascal Guérin, sera diffusé le dimanche 9 décembre à 20h45 sur Arte. Et à terme, un site internet dédié à La Lune pourrait également permettre au public de visualiser l’épave en 3D.
Texte : Isabelle Croizeau