Un problème soulevé il y a près de 20 ans
Une étude menée en 1990 par le professeur G. Richez indiquait 11.700 plongées durant la période estivale. En 2007, 22 clubs signataires de la charte déclaraient 30.000 plongées, dont la moitié sur l’îlot de la Gabinière, dont l’espace marin subit à certaines périodes de l’année une pression à la limite du supportable. Et la réalité des chiffres va certainement bien au-delà. Dès 1993, les scientifiques du Parc National de Port-Cros et les agents considéraient que le niveau d’activité était susceptible de poser de sérieux problèmes de protection du milieu, de maintien de la qualité des plongées, voire même de sécurité.
La naissance de la charte
La première charte de la plongée dans les eaux du Parc fut signée en 1994 par une vingtaine d’établissements qui s’engageaient principalement à limiter la fréquentation sur site, et à veiller à ce que le comportement des plongeurs soit respectueux de l’environnement sous-marin. Désormais, la charte de la plongée s’applique à tous, structures de plongée et plongeurs individuels (qui doivent désormais la signer à la capitainerie de Port-Cros), dont elle devient en quelque sorte un rappel à la loi : c’est une démarche juridique tout à fait originale qui en augmente la portée, un peu comme si à l’entrée d’une autoroute vous vous engagiez par écrit à respecter la vitesse maximale autorisée.
Limitation des plongées et pédagogie
Pour les opérateurs de plongée qui réalisent l’essentiel des immersions sur le domaine maritime du Parc, la charte impose la diffusion d’un message pédagogique à l’égard de leur clientèle, et la limitation du nombre de plongeurs à 40. Les formations ne sont pas autorisées sur l’îlot de la Gabinière, la pointe de la Croix et celle du Vaisseau. Les plongées de nuit y sont interdites. Ils s’engagent aussi à attirer l’attention de leurs moniteurs et des plongeurs sur la grande sensibilité du milieu, sur la nécessité de respecter et de faire respecter rigoureusement la réglementation du Parc national et les prescriptions de la présente charte, et notamment sur la prohibition absolue de tout nourrissage et de tout contact volontaire ou involontaire avec le substrat ou les espèces.
Une pratique loin d’être évidente
Mais ces dispositions sont loin d’être évidentes à respecter. Même si le niveau 1 ou équivalent est requis pour plonger dans les eaux du Parc, certaines plongées se font avec des courants violents, et il est parfois difficile de rester en pleine eau, à moins de vouloir être récupéré au large de Porquerolles ! De même, il est rare de voir des photographes, même les plus aguerris, réaliser des prises de vues en pleine eau, et la concentration sur le sujet se fait parfois au détriment de ce qu’il y a autour. En marge du festival de l’image sous-marine à Estartit en juin 2011, les responsables de la réserve des îles Medes ont présenté une étude indiquant que l’impact d’un photographe sur le milieu est deux fois plus important que celui d’un simple plongeur. Or, la photographie sous-marine connaît un succès grandissant avec l’émergence d’appareils photo numériques dont la qualité se rapproche de celle des « reflex », pour un coût bien moindre.
Difficile équation pour l’avenir
Difficile équation que le Parc National de Port-Cros en particulier, et les aires marines protégées en général, essayent de résoudre. La tentation serait grande de restreindre l’accès à certaines zones, maritimes ou terrestres (l’idée de « sanctuariser » l’îlot de la Gabinière n’est pas simplement une hypothèse d’école !), afin de limiter l’effet de charge. Plongeurs et opérateurs de plongée sont aujourd’hui bien conscients de la fragilité du milieu, mais aussi du fait que la surfréquentation d’un site nuit à la qualité de la prestation fournie.
Répartir la charge sur tous les sites
A elle seule, la Gabinière supporte la moitié des plongées réalisées sur le Parc, alors qu’elle ne dispose que de 5 dispositifs d’amarrage (15 sur l’ensemble des zones réservées à la plongée : Gabinière, Pointe de la Croix, Vaisseau, Galère, Montrémian, Bagaud). D’autres sites dignes d’intérêt existent (les éboulis du Vaisseau, le Tuff, le Nartassier, La tourelle de la Dame) peu fréquentés qui permettraient de réduire l’effet de charge d’autres sites. Et là, de belles surprises sont au rendez-vous ! Une meilleure répartition des plongeurs sur l’ensemble des sites serait donc certainement un gage de qualité de la pratique, et de protection des milieux. Pour que Port-Cros, et maintenant Porquerolles, continuent à être pour nous tous un fabuleux espace de découverte de la Méditerranée.