Atteindre les épaves profondes
Si par le passé le DRASSM avait déjà tenté de fouiller des épaves profondes (Sud-Caveaux 1 avec la Comex en 1995), l’archéologie française ne disposait pas des moyens techniques nécessaires. L’Archéonaute était en fin de vie, et n’était doté d’aucun équipement moderne. Mais le lancement de l’André-Malraux change la donne, et c’est tout naturellement vers l’épave de La Lune que les regards des archéologues se tournent.
Un navire mythique pour les archéologues
Le navire du roi Soleil est pour les archéologues une référence, un but. Découvert par hasard par le sous-marin Nautile en 1993 au large de Toulon, une première expertise avait été menée avec Ifremer, mais sa profondeur le rendait inaccessible pour une fouille complète, et les spécialistes continuaient à rêver à l’une des épaves les plus importantes et les mieux préservées au monde concernant cette période de notre histoire : elle a sombré en quelques minutes, entraînant avec elle près d’un millier d’hommes, toute son artillerie, et tous les équipements que pouvait porter un navire de guerre de l’époque. Pour les spécialistes, une mine d’informations, un témoignage unique qui va enfin devenir accessible.
Victime indirecte de la peste
En mauvais état, le navire de retour de la côte Algérienne se voit refuser l’accès au port de Toulon : on craint qu’il n’apporte la peste, et on l’oblige à rester en quarantaine à proximité de l’île de Porquerolles. Le bateau prend l’eau de toute part, mais un expert dépêché à bord le juge capable d’ »encore faire le tour du monde ! « Un coup de mer vient très vite prouver le contraire. Selon le témoignage du Duc de Beaufort, cousin du roi qui croise le navire en rentrant d’Alger, «La Lune coula comme un bloc de marbre». Une centaine d’hommes vont réussir à gagner Port-Cros, où la majorité va mourir de faim : il n’y aura en tout qu’une vingtaine de survivants d’après les historiens.
Une expertise approfondie en mars
Certes, malgré les outils technologiques dont dispose l’André-Malraux, le DRASSM ne pourra mener seul la campagne de fouilles, et devra s’appuyer sur Ifremer et la Marine Nationale. Mais la présence d’un bateau performant et moderne était une condition indispensable à l’entreprise. Le Cephismer et Ifremer mettront à disposition des robots téléopérés, des moyens humains et des moyens de levage qui viendront compléter les outils technologiques du DRASSM. La campagne du mois de mars sera surtout l’occasion d’une expertise approfondie de l’épave, pendant une quinzaine de jours. La fouille proprement dite aura lieu plus tard, et la date du chantier n’a pas encore été arrêtée.
Une nouvelle ère
La fouille de La Lune prendra sûrement des années, et promet aux archéologues, on l’imagine, des surprises et des satisfactions immenses. Elle sera aussi l’occasion d’établir nombre de nouvelles techniques, de protocoles de fouille, qui devraient donner accès à d’innombrables épaves profondes, parfois localisées mais jamais approchées, de toutes les époques, et chargées de toute notre histoire.