Nourriture, conditions de plongée et requins…
Sans nourriture, vous aurez assez peu de chance de croiser certaines espèces de requins. Comme une majorité d’animaux sauvages, la plupart sont craintifs, ou indifférents aux plongeurs et à leurs bulles. En revanche, la nourriture est un fort stimulant pour tous les animaux.Mais pour commencer, il faudrait s’entendre sur le terme anglo-saxon de shark-feeding qui est souvent fourre-tout par méconnaissance.
Appâtage ou amorçage ou «baiting»
Par exemple, sans amorçage vous aurez peu de chance de voir des requins blancs en cage. L’amorçage peut être épuisant pour un requin blanc quand l’animal est très sollicité avec des appâts naturels ou des leurres sur une même zone par de nombreux opérateurs comme en Afrique du Sud. Il épuise ses réserves en pure perte. Pour le baigneur ou le plongeur en cage, le risque est très réduit.
Les pratiques ont beaucoup évolué sur le sujet, avec moins de nourriture comme appât. L’objectif consiste à créer un courant olfactif pour attirer des requins sur zone. Avec les requins tigres ou requins bouledogues, par exemple, un tambour de machine à laver est utilisé dans une faible profondeur, fixé sous une bouée. La plongée se déroule en pleine eau. Sardines et crème d’anchois servent d’appâts.
Où est le danger ?
Quand on est en présence de prédateurs il existe bien évidemment certains risques à ne pas négliger en présence de nourriture. Raisons pour laquelle, le risque zéro n’existe pas et que ce type de pratique demande de l’expérience et du professionnalisme.
J’ai été témoin en plongée du meilleur comme du pire.
Amorçage (baiting) comme nourrissage (shark-feeding), peuvent être dangereux s’ils sont mal contrôlés et peuvent entraîner des résultats négatifs, voir tragiques aussi bien pour les humains, pour les requins, que pour l’économie touristique… même si le premier est bien moins sujet à controverse.
Les conditions de plongées ou les comportements adoptés par les plongeurs peuvent être bien souvent plus dangereux que la réputation supposée de l’espèce elle-même rencontrée.
Même avec son fidèle Labrador, il peut être dangereux de se prêter à ce jeu. Alors avec un requin !
A l’inverse, on peut plonger dans de bonnes conditions de sécurité et sans cage, en appâtant de grands prédateurs comme des requins tigres ou des requins bouledogues. Tout dépend des conditions.
Nourrissage ou «shark-feeding»
Le «shark-feeding» peu s’avérer parfois moins dangereux pour les plongeurs que l’appâtage («baiting»).
Avis de Johann Mourier
Johann Mourier est ingénieur halieute et doctorant au CRIOBE. Biologiste marin, il est spécialiste des requins. Son point de vue scientifique sur ce sujet s’est construit à travers différentes expériences.
Il s’avère que contrairement aux idées reçues, les requins fidèles à un site de nourrissage ne sont pas plus résidents et plus nombreux que sur des sites non affectés par cette activité. De plus, les requins citron équipés d’émetteurs, ne semblent présents sur le site qu’aux heures de nourrissage, et se dispersent ensuite pour se déplacer tout autour de l’île.
Avis de Denis Lagrange
Denis Lagrange est passionné par Rangiroa en Polynésie française. Il y est installé comme producteur, réalisateur de documentaires animaliers sous-marins. Depuis maintenant plus de 10 ans, il parcourt les mers du monde à la chasse aux images sous-marines. Il est aussi le propriétaire du centre de plongée «Ocean Kiss» intégré à l’hôtel Kia Ora de Rangiroa qui ré-ouvrira en Août 2011 après de belles rénovations.
En guise de conclusion…
Il est indéniable que le shark-feeding modifie le comportement animal et présente des inconvénients. Et en dehors des risques évoqués, l’impression de “plongée spectacle” manque cruellement de naturel.
Denis JEANT
BEES 2° en plongée subaquatique,
Naturaliste et passionné par les requins
Auteur d’ouvrages sur la plongée et sécurité en plongée.