5 morts et des tonnes de pétrole à la mer
Le 11 avril 1991, le pétrolier battant pavillon chypriote est mouillé au large de Gènes avec ses 36 hommes d’équipage, et dans ses cales 144 000 tonnes de brut. Une citerne explose, le navire se brise en trois. Une partie coule sur place, le reste est remorqué pour l’éloigner du port. Très vite, des nappes de pétrole dérivent vers l’Ouest, viennent souiller la côte Ligure, puis la côte d’Azur, jusqu’aux îles d’Hyères. Les autorités italiennes décident de brûler la plus grande partie du pétrole en mer : des colonnes de fumées noires s’échappent du bateau en feu, jusqu’à 100 mètres de haut. Le Haven coule finalement sur un fond de 82 mètres à 1,2 miles de Arenzano le 14 avril faisant 5 victimes dont le capitaine.
Une épave géante…
Pour se faire une idée de la taille de l’épave, il suffit de s’imaginer plonger sur un immeuble de 50 mètres de haut, de 50 mètres de large et long de 300mètres … le pont est aussi large qu’une piscine olympique. Et lorsque l’eau est claire, l’épave est particulièrement envoûtante. En tout, le Haven représente 15 000 mètres carrés d’épave à explorer, des ponts et des cales innombrables, des recoins, des coursives, un gigantesque labyrinthe…
…Mais accessible
Les mouillages sont simples à retrouver au dessus de l’épave, mais une fois sur le pont, il est facile de perdre tout point de repère… compte tenu de la taille du bateau. Mais l’avantage du Haven est d’offrir des plongées pour tous les niveaux ou presque. Le haut des structures ne se trouve qu’à 32 mètres. En revanche, les hélices sont à 82 mètres…Lorsqu’on se retrouve face au chateau arrière, avec le pont à 30 mètres plus bas qui part dans l’obscurité, la sensation est digne du film Titanic, avec Léonardo di Caprio à l’avantdu navire…
Des heures de tournage
Et pour rendre toute l’immensité du navire, il a fallu à Jérôme Espla, Romain Lhoste et l’équipe des heures de tournage. « en tout, explique-t-il, près d’une quinzaine de plongées de 120mn chacune. Une série sur l’hélice à 82m, une grosse plongée également sur la cassure avant à 80 et le long de la coque sur la vase. C’est l’avantage de plonger au recycleur pour ce genre de plongée. Nous avons passé également beaucoup de temps à localiser les hydrocarbures, en plongeant également dans les immenses cuves. J’ai tourné “large” pour monter un documentaire plus long. »
La démesure de l’hélice
L’hélice à elle seule représente la démesure du navire. Et reste pour Jérôme un souvenir hors du commun : « nous avons eu, dit-il, une visi hors norme et assez rare sur cette partie, plus de 20 mètres au fond. Le fond est très vaseux et le moindre courant soulève des nuages de particules. Il est très rare de voir l’hélice comme ça. Le gouvernail de 20 mètres de haut remonte presque au niveau du pont. C’était une vision extraordinaire : posé au fond en regardant vers la surface, voir tout l’arrière du navire et les rayons du soleil qui se devinaient au loin…
Des plongées « sportives »
Et parmi les souvenirs de tournage, certaines plongées particulièrement « sportives » ont été plus marquantes que les autres : moins d’un mètre de visibilité, et un courant digne d’une passe aux Maldives. « Il y a beaucoup de filets et de cordages sur l’épave, ajoute Jérôme, ce qui multiplie les risques à grande profondeur… mais nous plongions toujours avec des trimix assez riches en hélium, ce qui facilite la vie pour la lucidité… « L’équipe a effectué la majorité des plongées au mois d’avril, une période où la météo et la visibilité changent extrêmement rapidement dans le golfe de Gênes.
Trois sous l’eau au minimum
Pour chaque plongée, explique Jérôme, nous étions au minimum 3, Romain Lhoste que je filmais et Jérôme Alix qui faisait l’éclairage. A cela se rajoute une équipe de scientifiques du laboratoire Ecomers sur les plongées les moins profondes ou encore Caroline Espla lors de l’immersion de la Madone dans le poste de pilotage et Florent Locatelli lors d’une plongée dans le noir presque complet dans les structures sur le pont. »
Dentis, mérou et castagnoles
Avril, période principale de tournage, n’est pas la meilleure période pour faire de belles rencontres. « Mais en juillet dernier, raconte Jérôme, nous avons vu des bancs de dentis énormes sur le haut de la cheminée à 35 mètres, dignes des eaux de Port-Cros. En avril, il y avait beaucoup de petits poissons, comme des bogues, anthias, castagnoles, beaucoup de poissons à trou, comme les chapons et mostelles et quelques mérous ». Gino, le guide de plongée qui a accompagné l’équipe, a vu dans l’explosion babord un mérou de la taille d’une loche tropicale… A voir!!!! Moins spectaculaire mais digne d’intérêt, une blennie observée par les scientifiques Patrice Francour et Pascaline Bodilis, une espèce remontant de Suez et très rarement observée dans les 40 mètres, Parablennius pilicornis et un rouffe impérial, Schedophilus ovalis le long de la ligne de décompression.
Un bateau nettoyé mais encore pollué
Le Haven a été nettoyé plusieurs années durant, il reste encore beaucoup d’hydrocarbures à bord, un mélange de brut, d’huile, de fuel… Il s’agit en fait des hydrocarbures qui étaient en surface et qui ont été piégés quand le navire a coulé. Le Haven a brûlé 4 jours, et une grande partie des substances “légères” sont parties en fumée. Mais ces résidus de « brûlage », les goudrons, reposent à tout jamais sur les fonds et personne ne s’en soucie… « Et dans notre recherche, explique Jérôme, nous avons trouvé du goudron sur le fond bien sûr, mais aussi beaucoup de nappes d’hydrocarbures collées sur les plafonds. En remuant un peu, ces nappes flottaient et se collaient un peu partout sur le matériel… Aqualung nous a soutenus dans ce périple avec des “nettoyages” efficaces!!!! C’est impressionnant de penser que ce pétrole apparent représente la pollution ambiante des eaux de cette région et d’une bonne partie de la méditerranée. Combien de tonnes d’hydrocarbures sont rejetées à l’eau lors de déballastage ou dégazage? Le repère visuel est effrayant ».
Pour plonger sur le Haven
Deux centres à Arenzano proposent de plonger sur le Haven. Gino, de Techdive, a apporté son aide à l’équipe de tournage, en lui permettant notamment de plonger en étant seuls sur l’épave. Une ligne fixe qui part du bateau est amarrée sur le dessus de l’épave : pas de risque de se perdre car en remontant le long du château arrière, on arrive forcément sur le point le plus haut et donc au mouillage… Gino propose également des barres de paliers pour plus de confort et pour “étaler” les plongeurs lorsqu’il y a vraiment beaucoup de monde. Depuis janvier, il n’y a plus officiellement besoin de guide pour plonger sur l’épave. En dehors de l’aspect pétrole, c’est une épave hors-norme qui mérite la descente. « C’est aussi le moyen, conclut Jérôme, en observant un peu le milieu, de se rendre compte que la nature fait son possible pour maintenir un équilibre que l’homme tente désespérément de rompre… »
Et techniquement le tournage sous-marin?
Tout le tournage sous-marin s’est fait avec le canon 5dmarkII, un 15mm fisheye et le 16-35usmII en caisson hugyfot customisé.
Pourquoi le 5D? La qualité est surprenante, très sensible en basse lumière et relativement compact pour ce genre de plongée. J’ai soigné l’éclairage à chaque plongée, car il n’y a pas de belles images sans belle lumière. Je fais de plus en plus de tournage sous-marin avec le 5D qui est pour moi un excellent compromis entre qualité et maniabilité. Après cela reste un caisson photo, donc un manque d’ergonomie pour la vidéo, mais le fait de tout devoir gérer en manuel assure des réglages optimums fiables et stables à tout moment. Quelques réglages “maisons” et petits secrets de manipulations font que pratiquement tous les plans que nous avons faits sont exploitables.
C’est une configuration qui me convient bien en plongée profonde au trimix.
Nous avons également de superbes travelling au scooter sur le pont que je monterai dans la version doc ainsi que des images surprenantes le long de la coque à 80m vers l’avant.
La version longue du documentaire sera complètement différente du sujet pour France 2, beaucoup plus explosive….
Pourquoi le 5D? La qualité est surprenante, très sensible en basse lumière et relativement compact pour ce genre de plongée. J’ai soigné l’éclairage à chaque plongée, car il n’y a pas de belles images sans belle lumière. Je fais de plus en plus de tournage sous-marin avec le 5D qui est pour moi un excellent compromis entre qualité et maniabilité. Après cela reste un caisson photo, donc un manque d’ergonomie pour la vidéo, mais le fait de tout devoir gérer en manuel assure des réglages optimums fiables et stables à tout moment. Quelques réglages “maisons” et petits secrets de manipulations font que pratiquement tous les plans que nous avons faits sont exploitables.
C’est une configuration qui me convient bien en plongée profonde au trimix.
Nous avons également de superbes travelling au scooter sur le pont que je monterai dans la version doc ainsi que des images surprenantes le long de la coque à 80m vers l’avant.
La version longue du documentaire sera complètement différente du sujet pour France 2, beaucoup plus explosive….
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Bonus supplémentaire : encore quelques images!