L’humeur de Francis Le Guen
Parce que des fois, faut quand même pas déconner !
Crédits musique : Erwan & Eric Le Guen
La photo sous marine, quel beau loisir ! Mais dans ce domaine, il y a deux sortes de photographes. Parlons d’abord des «animaliers». Volontiers misanthrope, le photographe animalier et en particulier «macro» est un solitaire qui passe sa plongée le masque collé sur 1 m2 de récif et qui fait le siège de la crevette commensale, du crabe mimétique et minuscule ou du nudibranche à la lenteur exaspérante. Cela suffit à son bonheur. Bardé de caissons, tubes allonge, flashs et lampes pilotes, il vit sa plongée par le petit bout de la lorgnette et fait chier toute la palanquée immobile qui se les caille, en attendant…
Mais il faut aussi parler des «anthropomorphes», c’est à dire ceux qui photographient les gens sous l’eau. De préférence des femmes. Et se pose dès lors le problème du modèle. Ben oui. Le photographe «animalier», lui, n’a pas besoin de modèles : ils sont fournis avec la plongée !
Mais les «photographes de plongeurs» fonctionnent eux en binôme, au minimum. Souvent mari et femme, copain, copine. Et sous l’eau, les scènes de ménages sont la règle. Le photographe passe son temps à mouliner des bras et à pousser des rugissements dans le détendeur devant ce modèle qui décidément ne comprends rien à rien ! A gauche ! Plus haut ! Plus près… Etc. Mesdames, toutes mes condoléances…
Mais que dire du rendu ? Les photos de plongeurs et plongeuses en action, passe encore, c’est assez naturel et il est en effet souvent nécessaire de placer un personnage dans une scène sous marine, ne serait ce que pour donner une échelle, une perspective.
Mais voilà qu’ont débarquées y a quelques années les «photos créatives». Une appellation qui a toujours fait tordre de rire les photographes pros, les vrais, ceux qui vivent de leur travail et pour qui la créativité est une nécessité. Par définition. Ces «créations» sont devenues à la mode par le biais des différents concours photo, comme un passage obligé. Il y a même des épreuves en piscine ! Et le mauvais gout est souvent la règle de cet exercice…
Ainsi, la tendance actuelle est à la fripe mouillée. Aux photos de serpillères. Pas une journée sans qu’on découvre sur les réseaux sociaux la photo d’une naïade toute habillée, hagarde, les yeux rouges de chlore, plus ou moins emberlificotée dans des draps trempés au milieu des bulles de savon. C’est la grande lessive ! Car on s’est aperçu que les textiles sous l’eau, à l’instar des cheveux, flottent, virevoltent, tirebouchonnent et que c’est bo ! Créatif ! Alors, on nous sert maintenant des fringues trempées à toutes les sauces.
Au début, la nouveauté a plaidé en faveur de ces défilés de mode sous marins. Mike Portelly, Zena Holloway, Elena Kalis et quelques autres nous ont offert des images magnifiques de ce style. Mais pourquoi imiter, le mauvais gout en plus ? Parce que dans le genre, la plupart des modèles font pitié. Et les drapés vaporeux, la grâce et la beauté, c’est un métier. Il ne suffit pas de se mettre un torchon mouillé autour des fesses et de patouiller dans le corail…
Mais, finalement, quand on y réfléchis bien, qu’est ce que c’est que cette couillonnade de plonger tout habillé ? Serait-ce pour contourner la pudibonderie anglo-saxonne qui se plaint à l’ONU dès qu’elle voit une femme à l’eau, nue ? Voilà qui est anglo-sexiste !
Sur Facebook qui est devenu le mètre étalon des bonnes moeurs et des «cercles vertueux» (sic), on camoufle les foufounes et les tétons, sous peine de radiation. On triche avec la nature, pour soi disant «protéger» la jeunesse… Qui se régale par ailleurs de films cochons sur le même internet… C’est quoi ce problème avec la nudité ?
Dans l’art classique, le nu est la règle. Michel Ange n’a pas mis un cache sexe sur la statue de David qui trône au Prado à Marseille… Courbet n’a pas peint non plus un string sur la glorieuse toison de «l’Origine du monde». Passons.
Mais foin de pudeur messieurs les photographes, sautons le pas ! Déculottons les modèles une bonne fois pour toutes au lieu de les camoufler dans de la dentelle de Jouy ! Question isothermie, ces dames ne feront pas la différence…
Et un peu de parité, que diable. Si j’en crois la gente féminine de mes réseaux, il y en a un peu marre des sirènes. Ces dames voudraient du muscle ! Des hommes, des vrais. Des rugbymen à poil. De la quéquette sous-marine. Comment les en blâmer ? 99,9 % de l’iconographie du genre est féminine. Allez messieurs, qui se dévoue ? Je ferais les photos ! Pas d’amateurs ? C’est vrai que, question grâce, on peut tous allez se rhabiller…
D’ailleurs, parlons en ! De se rhabiller. Je ne sais pas si vous avez remarqué mais le monde sous marin est noir ! Gants noirs, chaussons noirs, stabs noires, palmes noires, marées noires… Oh, bien sûr il y a des fabricants qui s’évadent un peu, rajoutent quelques petits chevrons de couleur ici ou là mais dans l’ensemble, côté vêtements de plongée, on a le choix entre noir et noir… C’est même devenu le synonyme de Néoprène car, pour des raisons de coût, tous les équipementiers se fournissent auprès des mêmes grossistes asiatiques. Ceci explique sans doute cela.
Et pourtant, les mêmes asiatiques fabriquent de véritables merveilles en Néoprène. Dans les années 90, le japonais Tabata proposait des vêtements dignes d’un défilé de mode (on y revient). Des camaïeux vanille/caramel/chocolats, des ensembles fluo, pastels, arlequins et tous les accessoires du même tonneau, palmes et détendeurs compris. C’était quand même plus gai. Et plus photogénique. Vous m’auriez vus en rose, à l’époque…
Si l’on en croit les spécialistes des tendances, le jaune s’invite actuellement dans les défilés de mode, que ce soit chez Michael Kors ou chez Dior, et ce dans toutes ses déclinaisons. Jaune pâle, néon, ou poussin : toutes les teintes sont possibles. Chez Kenzo, c’est l’orange qui s’imposera cet été. Chez Gucci, le rose ; chez Givenchy, le bleu layette. Chanel optera pour le rouge et Valentino pour le beige (ou sable). Mais pas de noir !
Alors ? Moi je dis çà, je dis rien…
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Superbe. Bravo à Nicolas et à toute l’équipe