Le continent africain regorge de vie sauvage terrestre et sous-marine. Du sud du Mozambique à l’extrême Sud de l’Afrique, la richesse des eaux, des courants, de la biodiversité sous-marine et les migrations ont permis à une faune bien particulière de s’installer. En effet, c’est l’un des rares endroits sur terre où il est possible de rencontrer et de plonger avec autant d’espèces de requins, environ une centaine, du plus gros, le requin baleine de 12 m, au plus petit, le requin chat de 20 cm : un tel voyage dans cette contrée sauvage change définitivement toutes vos perspectives !
Ceci est le récit d’une expédition de quinze jours spécialement dédiée à la découverte des sélaciens de cette région. Nous parcourrons la côte sud du Mozambique à la recherche du redoutable requin bouledogue, puis la côte du Natal où vit le mystique requin tigre, enfin la pointe sud du continent africain pour une rencontre hors du commun avec l’énigmatique grand requin blanc, encadrés par une figure de la plongée non moins charismatique, Brian, notre guide, propriétaire de la société Afrique du Sud Découverte.
Plongées, mais pas que !
Pour les “globe-palmeurs” en herbe, cette destination reste emblématique en raison de la qualité des rencontres sous-marines. Mais ce lointain voyage est aussi l’occasion unique de découvrir l’extraordinaire faune terrestre que vous offrent ces pays. Depuis plus de trente ans, Brian est également un spécialiste de la faune sauvage africaine. Trois fois durant le séjour, il nous guidera dans des réserves permettant l’observation des grands animaux d’Afrique…
Bonamanzi
C’est notre premier soir sur le sol sud africain et nous voilà déjà dans le bush. À la nuit tombée, en allant nous coucher, non sans avoir traversé une végétation luxuriante, il n’est pas rare de croiser impalas et phacochères au pied de notre porte ! Bienvenue en Afrique ! Le lendemain au lever du soleil, nous prenons enfin toute la mesure de l’ampleur du décor, avec son lot de surprises… des crocodiles du Nil de plus de 3 m vivent autour de notre bungalow !
Hluhluwe
Dans la même journée, nous partons dans l’immense réserve du nord du Natal de plus de 19 000 hectares ! L’entrée nous rappelle Jurassic Parc ! Brian nous emmène dans son 4X4 bringuebalant à travers talus et fossés pour débusquer ces animaux qu’il connaît si bien. Il est possible de croiser les “big five”, à savoir éléphants, lions, léopards, buffles et rhinocéros, ainsi que zèbres, antilopes et hippopotames.
St Lucia
Plus tard dans le séjour, nous visiterons le lac de St Lucia qui abrite la plus grande concentration au monde d’essences d’arbres et d’espèces d’oiseaux. L’attraction du lieu est surtout la balade sur le lac à la recherche des quelques 1500 hippos et 500 crocodiles qui le peuplent.
Ponta Do Ouro, un paradis sous la Mer
Après avoir passé la frontière de Kosi Bay sur une route bien bitumée, l’arrivée au Mozambique est sidérante ! Pas une route, ni même un sentier ou un chemin, mais bel et bien des pistes à peine tracées à travers le bush par les rares véhicules qui nous ont précédés ! La transition est radicale ! Nous sommes seulement à 15 km de notre destination. Il nous faudra plus de 30 min pour y parvenir.
La première impression lorsque l’on arrive à Ponta, c’est la quiétude dans laquelle vit la population. Les conditions sont précaires, mais à la différence des zones urbaines sud-africaines qui rappellent l’Angleterre sous le soleil, là, le dépaysement est total ! Les habitants sont très accueillants et s’adonnent à la pratique la plus populaire du coin, faire la fête et boire les célèbres R&R au pub Fernando ! Les activités principales de cette minuscule station balnéaire sont la plongée, l’observation des mammifères marins, la pêche sportive et le surf.
Cette petite ville a poussé à la sortie du canal du Mozambique entre le continent et le sud de Madagascar, zone propice à la prolifération des espèces sous-marines. Ce haut lieu de la plongée ravira les amoureux de gros comme de petit. Nous plongerons dans le modeste mais très professionnel club Back to Basics Adventures, géré par Ruppert et Jenny. Les plongées s’effectuent en sorties pneumatiques et le passage de la vague tout comme le « beachage » au retour, peuvent parfois être mouvementés. Le site le plus éloigné est Pinnacles, à 30 min et 40 m de profondeur, voire davantage, connu pour sa communauté de requins bouledogues et sa faune pélagique. Les autres récifs sont entre 5 et 20 min de la plage et l’on y croise tous types d’espèces benthiques et pélagiques, sur des fonds de 20 m. La température de l’eau, variable, oscille entre 20°C et 28°C. Les plongées ont lieu tôt le matin, à 6h00 pour la première sur Pinnacles, suivie d’un retour au club vers 9h00 pour un nouveau départ à 11h00. Nous y plongerons 4 jours. À voir : baleines à bosse, dauphins, requins baleines, requins tigres, requins bouledogues, requins marteaux, requins bordés, requins sombres, requins à ailerons argentés, bancs de mobulas, raies aigles, raies mantas, marlins voiliers… et j’en passe!
Brian et ses protégés
Brian est un personnage atypique. Après avoir voyagé en tant qu’ingénieur et vendeur en équipement lourd durant 30 ans sur le continent Africain, dans les îles de l’Océan Indien, en Asie du sud-est et à Madagascar, ce tireur d’élite, policier, champion de tir de combat et spécialiste de la faune sauvage, a lancé avec ses amis la plongée requins sur la côte du Natal, il y a plus de 15 ans. Il s’est spécialisé sur une espèce en particulier, le requin bouledogue, qu’il semble avoir « apprivoisé » depuis qu’il plonge sur Pinnacles, voilà maintenant presque 10 ans. Non seulement plongeur professionnel, Brian est également passionné par tout ce qui touche à l’Afrique. Il est guide agréé par le Département du Tourisme du Kwazulu-Natal en ce qui concerne la plongée, la nature, la culture des Zoulous et l’histoire militaire de cette région.
Aliwal Shoals, l’escarmouche de requins
Après nos quatre jours passés au Mozambique, nous redescendons en Afrique du Sud et passons par St Lucia avant de rejoindre la petite ville de Umkomaas à 45 km de Durban.
C’est à quelques miles, en face, que nous plongerons sur le très célèbre récif de Aliwal Shoals. Cette zone est particulièrement réputée pour la grande communauté de requins tigres, de requins bordés et de requins taureaux que l’on croise une grande partie de la saison.
À la différence du récif de Pinnacles à Ponta, Aliwal Shoals s’étale sur une très grande surface. Afin d’attirer un maximum de requins au plus près des plongeurs, les structures de plongée pratiquent le « baiting » ou « appâtage » pour faire venir les timides requins tigres — voir articles sur les requins tigre, dans Le Mag N°63. Nous sommes encadrés par Brian et son ami Lloyd, un vidéaste professionnel qui plonge depuis plus de 20 ans avec les requins tigres.Tôt le matin, nous passons la vague sur le pneumatique tout comme au Mozambique et partons sur le récif pour y effectuer notre première plongée. Plus loin dans le courant, un tambour de machine à laver rempli de 20 kg de sardines, d’huile de foie et de sang a été mis à la dérive pour attirer les requins. Durant cette première plongée, nous partons à la recherche des requins taureaux que l’on peut observer seulement une partie de l’année, dans de grandes grottes sur le récif où ils viennent se reproduire. La deuxième plongée s’effectue en dérivante et nous est expliquée par Brian. L’eau fluctue entre 23°C et 26°C.
Ici même programme qu’au Mozambique, le zodiac part tôt le matin avec suffisamment de blocs à bord pour deux plongées. Nous y resterons deux jours. La haute saison pour les requins taureaux est de juin à novembre, celle des requins tigres de décembre à juin et les requins bordés sont visibles toute l’année.
Magical False Bay
Le lendemain de nos dernières plongées sur Aliwal Shoals, nous prenons l’avion en direction de Cape Town. False Bay est une baie encadrée par la péninsule du Cap à l’Ouest et par le cap Hangklip à l’Est. Elle est donc située à l’extrémité sud de la « Plaine du Cap ». À environ 40 km de Cap Town se trouve Simon’s Town, dernière ville de la péninsule avant Cap point.
C’est également une base navale. Nous prenons nos quartiers sur les hauteurs de la colline qui surplombe le port. La ville présente de nombreuses maisons victoriennes et des monuments coloniaux comme la maison de l’amirauté (1814) et la chapelle Wesleyan (1828), l’hôpital de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (1764) ainsi que des musées dont le musée naval d’Afrique du Sud.
Simon’s Town est également un petit port de commerce et de villégiature ainsi qu’une station balnéaire et touristique. La plage de Boulders Beach accueille depuis 1985 une colonie sauvage de manchots du Cap. En face, à 30 min de bateau au milieu de la baie, se trouve Seal Island qui regroupe une communauté de plus de 45000 otaries à fourrure du Cap. On trouve à 25 km au sud de Simon’s Town la réserve de Table Mountain avec Cap Point et le Cap de Bonne Espérance.
Mais l’attraction principale de cette ancienne ville coloniale est la plongée requins. Nous plongeons chez Shark Explorers, un club de plongée familial qui propose des sorties uniques à la découverte de requins hors du commun. Si on s’y intéresse de plus près, le business requin dans ce coin est avant tout une histoire de famille. Ainsi Sharkman Aka, Mike Rutznen et sa famille se partagent False Bay et Gansbaai une pépinière de requins blancs. Nous sommes merveilleusement accueillis à Shark Explorers par la sœur de Mike, Ria, et son neveu Morne, propriétaire du club et vidéaste professionnel pour la BBC.
La météo, capricieuse dans cette région, peut changer 10 fois par jour! Aucune sortie n’est programmable à l’avance et elle se décide donc le matin du départ, ou la veille au soir grâce aux prévisions météo. S’équiper d’une bonne combinaison car les températures varient entre 11°C et 21°C !
Inshore dive ou prédateurs contre proies
Habituellement, les forfaits plongées comportent deux plongées le matin. Retour sur le quai vers 11h30, midi, ce qui vous permet de profiter de votre après-midi. Pour ces plongées, départ vers 7h00 ou 9h00 du matin en fonction des conditions météos. Nous arrivons en combi sur le quai où nous sommes réceptionnés sur un semi-rigide de 10 m, notre matériel déjà à bord ainsi que la seconde bouteille pour la deuxième plongée. Nous quittons le port aux premières lueurs du matin. L’ambiance nous rappelle la côte bretonne ensoleillée, avec le décor d’un vieux port écossais sortant de la brume. On entend presque des sons de cloches ! Les deux sites sont à moins de 20 min de Simon’s town, le long de la côte qui nous mène à Cap Point. Nous commençons soit par les otaries à fourrure du Cap, soit par la forêt de Kelp.
Pour les otaries, impossible de plonger dans le vivier du Grand blanc sur Seal Island, mais il existe un petit îlot sur lequel vit une communauté d’une centaine d’otaries. La plongée s’effectue entre 5 et 10 m, là où elles viennent jouer et se rafraîchir. Consigne de sécurité importante : ne pas essayer de toucher les otaries qui possèdent tout de même une série de crocs impressionnants ! De plus, véloces, elles virevoltent dans tous les sens, devant, derrière, entre vos jambes, au-dessus, au-dessous des plongeurs en une valse souple au tempo très rapide. Presque impossible de savoir où donner de la tête, sauf lorsque l’une d’entre elle se prend d’intérêt pour vous et vous permet de partager un moment d’intimité… Du bonheur ! Le fond corallien est lui aussi extrêmement riche ! Vous y admirerez nudibranches de toutes espèces et de toutes couleurs, coquillages, crabes, éponges fluos, étoiles de mer ainsi que le requin Pyjama (Poroderma africanum). Pas de temps de plongée limité. Si vous avez trop froid, n’oubliez pas de remonter car une deuxième plongée vous attend 30 min plus tard. Les otaries sont visibles toute l’année.
La forêt de Kelp s’étend sur une surface relativement large. La plongée que nous effectuerons sera sur une distance plutôt faible, car comme avec les otaries, pas vraiment besoin de bouger, les sujets viennent directement à nous. Très riche, il vous est possible de croiser le requin pyjama, la roussette sombre (Haploblepharus pictus) et le virli dentu (Triakis magalopterus) proche cousin du requin léopard (Triakis semifasciata). La lumière perçant les grandes branches d’arbres sous-marins qui sont en fait des algues, donne l’impression que le temps est au ralenti voire même sur pause ! Vous êtes bercés par la douce houle, à l’affût d’une rencontre inattendue ! Soudain, une silhouette se dessine à la limite de votre champ visuel. Elle se rapproche doucement, corps cambré, tête et axe d’approche incliné du haut vers le bas. La taille se découvre, un bon 3 m vous regarde avec son large sourire, frôle votre combinaison et disparaît dans la forêt de Kelp aussi vite qu’il est arrivé. Vous venez de faire un bond de 150 millions d’années en arrière, en plongeant avec un dinosaure, le requin plat-nez à 7 fentes branchiales (Notorynchus cepedianus). Cette forêt en abrite plus de 70 spécimens de toutes tailles. Lorsque vous vous focalisez sur celui – ou ceux – qui est -sont – face à vous, vous ne voyez pas celui qui se faufile sous votre bras! Ce requin n’est absolument pas farouche et s’approche des plongeurs sans aucune espèce de gêne! Rencontre d’anthologie au ralenti pour 60 min de pur bonheur ! La haute saison est de septembre à mai.
Offshore dive ou l’aventure pélagique
Départ tôt. Même organisation que la plongée in-shore. Une seule immersion programmée. Nous prenons le semi-rigide pour une sortie à plus de 80 km au large du Cap de Bonne Espérance. Il faut compter 2 heures de trajet en fonction des vagues – et uniquement si la météo est bonne – pour nous retrouver au-dessus d’un canyon à 500 m de fond, en plein bleu, entourés par des plaines océaniques à 3000 m de profondeur. L’eau est plus chaude car nous bénéficions du courant des Aiguilles, 21°C environ, qui descend du canal du Mozambique.
Cette zone est propice aux espèces épipélagiques. Nous immergeons un bidon chargé d’huile et de carcasses de thon dans le courant. Quelques minutes plus tard, des thons albacores de 100 kg font leur apparition, suivis de requins peaux bleues (Prionace glauca) par dizaines. Avec un peu de chance, un ou deux requins mako (Isurus oxyrinchus) se mettent à rôder timidement autour du bidon avant de se rapprocher. Si le courant est faible, avant la plongée, une sortie en PMT est envisageable ! Pas de temps limité pour cette expérience pélagique extraordinaire. La meilleure période est d’octobre à juin.
Seal island ou la rencontre avec le Seigneur blanc
Au petit matin, nous retrouvons le quai de départ pour une sortie sur un catamaran d’une dizaine de mètres. La plongée ou plutôt l’immersion aura lieu sur Seal Island à 45 min de navigation, en plein milieu de False Bay. En plus du bruit des 45000 otaries à fourrure du Cap, sous le vent, nous sommes saisis par une odeur nauséabonde de déjections, qui disparaît heureusement une fois passés sur le versant Est de l’île. C’est ici, dans son garde-manger que nous pouvons croiser la star des océans, sa majesté le Grand requin blanc (Carcharodons carcharias). Il nage dans ces eaux troubles et sombres à la recherche de nourriture, attiré par le fumet qui émane des otaries. La technique consiste à mettre l’embarcation sous le vent dans le courant et de créer un couloir olfactif à l’aide d’huile, de sang et d’appâts, pour que le requin confonde l’odeur du bateau avec celle de l’île. De la surface, il n’est pas rare, avant même de lancer l’activité, d’en croiser un ou deux qui évoluent sous la surface de l’eau, une otarie entre les mâchoires. C’est une zone de chasse ! Impossible donc, en rajoutant à cela une visibilité de 3 à 6 mètres de s’immerger sans protection. C’est pourquoi une cage est mise à disposition pour accueillir 3 personnes et leur permettre de profiter du spectacle de cet énorme requin en toute sécurité. Pas de niveau de plongée requis. Cette activité s’adresse à tous. Une fois l’atelier mis en place et l’attention du requin suffisante, nous plongeons la tête sous la surface de l’eau, soit de la surface soit en bouteilles. L’attraction va consister à faire s’approcher le requin le plus possible de la cage pour le voir passer à côté de vous tranquillement.
Une rencontre unique, insolite et magique qui vaut largement tous les reportages télévisuels sur le sujet ! Deux sorties sont prévues dans la journée. À False bay, ils sont observables de février à septembre et à Gansbaai toute l’année.
Vous l’aurez donc compris, l’Afrique australe est une région du monde où il est possible de vivre un vrai reportage animalier en seulement une ou deux semaines. Entre terre et mer, les animaux les plus sauvages de la planète sont à votre portée pour des moments uniques à vivre et gravés à tout jamais dans votre mémoire.
prochaines expéditions
– 09/03/15 au 19/03/15 Mozambique et côte du Natal
– 20/03/14 au 30/03/15 False bay
Pour plus d’infos sur les prochaines expéditions, n’hésitez pas à me contacter à steven@sharkeducation.com ou pour plus de détails sur www.sharkeducation.com .
Steven Surina
Steven Surina est moniteur de plongée en mer Rouge. À ce titre, depuis une décennie, il accompagne les croisières le long des côtes égyptiennes, soudanaises et érythréennes. Il a travaillé en partenariat avec la maison d’édition italienne “Magenes Editoriale” sur le projet d’un recueil de sites de plongées sur toute la mer Rouge égyptienne en tant qu’auteur et illustrateur. Il rédige un mémoire sur le comportement des requins océaniques en 2008 et fait distribuer dans les écoles égyptiennes des fascicules interactifs sur la protection et la préservation des requins.
Il participe en compagnie du Dr Erich Ritter à une série de séminaires. A l’issue de ces mois de travaux et d’expérience communes avec la Shark School d’Eric Ritter, il lance ses propres conférences en 2009. C’est ainsi qu’il crée, en 2010, Shark Education qui propose des séjours plongée requin dont l’objectif est d’aider à mieux les connaître et les comprendre.
0 commentaire
il n’ y a plus qu’ une solution s’ adresser à un organisme mondial de protection de la nature et faire classer la région au rang de patrimoine de l’ humanité mais attention c’ est pas sans conséquence …sur les pêcheurs
mais aussi sur le tourisme dont on fait partie. si la zone devenait sanctuaire il est probable que les bateaux ne puissent plus s’y rendre ou alors sous des conditions trés strictes….