Brian Carney est le Président de SDI/TDI/ERDI, celui-ci vient de publier sur internet un billet “d’humeur” quant à ses préoccupations au sujet du futur de la plongée professionnelle. En effet, aux USA, une affaire ébranle le monde sous-marin et PADI… Ses propos sont personnels mais les faits sont vérifiables.
Il a nous semblé intéressant de les traduire afin de vous les livrer.
LETTRE OUVERTE SUR MON AVENIR DANS LA PLONGEE par Brian Carney
J’ai passé le plus clair de mes vingt-cinq dernières années dans l’industrie de la plongée. Plongeur dans un aquarium, formateur dans un programme universitaire de plongée, membre de l’équipe de cadres d’un fabricant, je suis maintenant Président et directeur de l’agence de formation SDI/TDI/ERDI. Pendant toutes ces années, j’ai pris le plus grand plaisir à travailler avec des gens du monde entier et à leur apprendre à respirer sous l’eau pour la première fois. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de m’investir dans une carrière dans cette industrie de la plongée.
Mon expérience et les responsabilités toujours grandissantes que j’assume m’ont permis d’observer l’évolution, les innovations et les directions que prenait l’industrie de la plongée. C’est en raison de ces responsabilités et de ma position au sein d’une agence internationale de formation, que je crois de mon devoir de révéler certains événements survenus dernièrement dans cette industrie. Ils sont au placard et enterrés pour le moment à la suite d’accords confidentiels qui portent préjudice à l’éthique du monde des affaires en général et au développement de l’industrie de la plongée en particulier. Tous ceux qui ont travaillé avec moi savent combien je préfère être positif et combien dénigrer ne me ressemble pas. Ils vous diront que c’est aussi ce que j’attends de mes partenaires : un respect professionnel réciproque et le devoir de faire progresser l’industrie de la plongée dans son ensemble.
Malgré mes réticences, nous voici arrivés à un stade où je me sens obligé de m’exprimer sur la politique adoptée par un autre organisme de formation vis-à-vis de ses membres instructeurs, car je crois leur action préjudiciable à l’ensemble de la profession. Après avoir hésité et longuement réfléchi, j’ai finalement décidé que, quel que soit l’organisme auquel j’appartiens, je me dois de soutenir l’industrie de la plongée avant tout et donc de révéler certains faits. En effet, si la plongée choisit cette direction, nous allons vers de graves difficultés.
Un procès est actuellement en cours devant un tribunal fédéral de l’Utah (v Tuvell Boy Scouts of America, et al,… Cas 1 : 12-cv-00128 DB), concernant un garçon qui a perdu la vie dans un programme PADI Discover Scuba Diving. Habituellement, PADI soutient ses membres et les défend vigoureusement en cas de litige… mais pas cette fois.
Sans procéder à une enquête ni attendre que les autorités aient fait la leur, sans même interroger aucun témoin et moins de deux semaines après l’accident, PADI a radié l’instructeur, un vétéran de la guerre d’Irak, en lui indiquant seulement que sa collaboration avec PADI « n’était plus dans l’intérêt supérieur de PADI ». Et lorsque l’instructeur a demandé des explications et quelles normes PADI il avait bien pu violer, PADI n’a pas même eu la courtoisie de lui répondre.
Lorsque les parents du garçon ont déposé plainte contre eux, PADI a choisi de régler le problème directement et tenté de cacher les accords conclus confidentiellement en s’associant à la défense du plaignant par des pièces normalement confidentielles versées au dossier, chargeant ainsi secrètement son instructeur. Le Juge fédéral a eu vent de cette conduite et il a sanctionné PADI. Vous pouvez accéder et commenter ce « Document 182 » dans le dossier de l’instruction, ouvert au grand public sur >www.pacer.gov<
PADI a encore poussé la vilénie jusqu’à verser une somme considérable d’argent pour régler cette affaire. Le montant exact figure sur le procès-verbal de l’audience du tribunal du 23 avril 2014 au cours de laquelle PADI a été sanctionné. Il est également visible sur ->www.pacer.gov< Mais l’entente de règlement préparée par PADI contient une clause où les parties sont convenues que l’instructeur membre de PADI était responsable à 100 %. Après règlement, PADI a donc ensuite confié des rapports d’incidents relatifs à son membre instructeur à la partie adverse, sans bien sûr juger bon d’informer l’instructeur mis en cause qu’il le faisait.
Ce sont les rapports que tous les membres sont tenus de déposer comme condition de leur accord en tant que membres PADI. Ces mêmes documents de gestion des risques disent, eux : « Ce rapport est établi en vue de recevoir des conseils juridiques en anticipation d’un éventuel litige ». En d’autres termes, les rapports d’incidents sont confidentiels. Ils sont protégés contre la divulgation à la fois par le secret professionnel de l’avocat de l’instructeur membre et par la déontologie de l’avocat qui défend les intérêts communs et de PADI et de l’instructeur. L’avocat de l’instructeur a insisté pour que PADI rappelle les documents et les protège, mais ils ont refusé. Rappelez-vous qu’ils avaient signé un règlement secret avec les plaignants incluant une clause de collusion.
C’est un exemple parfait : jeter l’instructeur directement dans la gueule du loup pour défendre ses propres intérêts corporatistes égoïstes et le rendre responsable de tout, alors qu’il n’avait fait que suivre les standards de PADI à la lettre.
Certes tous les détails de ce qui s’est réellement passé au cours de la plongée ne seront connus qu’à la fin du procès, mais au vu de ce dont le grand public a connaissance actuellement, cet instructeur a suivi toutes les normes de formation requises. On est donc en droit de se demander pourquoi PADI expulse un de ses membres aussi rapidement, sans enquête préalable, puis se rapproche de l’avocat de la partie adverse avec lequel il est de mèche désormais, si ce n’est pour charger l’instructeur ! Ceci n’est qu’une hypothèse, puisqu’on attend encore la réponse de PADI aux multiples demandes du Tribunal Fédéral et de l’opinion publique. Mais tout semble plutôt clair et évident pour tout observateur des coulisses de l’affaire.
J’écris cette lettre ouverte à l’industrie de la plongée pour faire la lumière sur les raisons pour lesquelles PADI a choisi une voie si particulière dans ce procès de l’Utah. Le Centre de Plongée et l’instructeur étaient assurés chez Willis Insurance qui ne font pas partie des assureurs associés aux programmes PADI. Cet accident pouvait générer une mauvaise publicité et remettre en cause la sécurité de son programme Discover Scuba Diving. PADI voulait donc sortir de là le plus rapidement et le plus discrètement possible. Parce que cela ne porterait pas préjudice à leur propre programme d’assurances, ils ont tout simplement choisi d’expulser leur membre et de le mettre à l’index. Ça ne leur coûterait rien. Cette théorie est étayée par le fait que les assureurs de PADI ont demandé au Tribunal, en annexe au procès, de condamner les assureurs Willis à la prise en charge des frais juridiques de PADI dans le cas Tuvell.
Les assureurs PADI sont restés impliqués une année dans ce procès, en connivence avec les plaignants, après que PADI les ait exonérés de toute responsabilité dans l’affaire Tuvell. Ils n’ont jamais révélé non plus au Juge fédéral que PADI avait réglé l’affaire sous-jacente.
Vous devez probablement vous demander pourquoi j’écris cette lettre pour défendre un instructeur PADI dont la responsabilité est mise en cause suite au décès d’un plongeur dans un de ses cours ? C’est parce que je crois que l’une des plus grandes agences internationales de formation en plongée se doit de se conduire de façon positive, pour le bien de l’ensemble de la profession. Par le passé, ce genre de comportement, ester en étant de connivence avec les plaignants, a été désapprouvé par tous, sans compter que c’est tout à fait illégal. En fait, par le passé, PADI a publiquement attaqué et ridiculisé des avocats et des témoins qui travaillaient pour la défense dans leur propre intérêt mais voilà qu’eux aussi agissent maintenant de cette façon avec des plaignants. Ca y est ? Vous commencez à percevoir l’absurdité de tout cela ? PADI pense qu’il est correct d’être de connivence avec les plaignants pour blackbouler leur propre instructeur et comploter à anéantir sa défense… tout en condamnant tous ceux qui aideraient des plaignants abusivement.
Voir PADI agir ainsi devrait tous nous inquiéter… non seulement tous les instructeurs de plongée, mais aussi tous les propriétaires de magasins de plongée, tous les fabricants de matériel de plongée, et tous les médias, qui, tous, ont intérêt à se demander s’ils peuvent désormais encore faire confiance à PADI ou plus du tout. Il faut se poser la question : « PADI me feront-ils la même chose si ça sert leurs intérêts ? » Suis-je la prochaine victime à passer à la trappe ? Je ne m’en suis jamais pris à aucun instructeur, quel que soit l’organisme auquel ils appartenaient ou parce qu’ils pourraient me faire de la concurrence. Au contraire, j’ai choisi de les défendre quand ils étaient en mauvaise posture. A mon avis, en tant que Président d’une agence de formation de plongée et qu’homme d’affaires actif dans l’industrie de la plongée, le comportement de PADI était irresponsable, secrètement égoïste et très nauséabond. Une grande firme ne tente pas de sacrifier un de ses membres qui a agi entièrement selon ses codes de conduite. Ce comportement inspire le mépris et dessert l’ensemble de l’industrie de la plongée.
Je termine cette lettre en disant que je recommande, que j’exhorte même tous les professionnels de l’industrie de la plongée à demander aux organismes avec lesquels ils travaillent de mettre par écrit que tant que vous suivrez leurs normes vous serez soutenus par ces organismes. SDI/TDI/ERDI se fera un plaisir de le faire quelle que soit votre compagnie d’assurance et je mets tous les organismes de formation au défi de faire la même chose. Comment travailler en tant qu’instructeur avec des organismes auxquels nous ne pouvons pas faire confiance pour nous fournir une aide pugnace en cas d’accident quand les normes sont respectées? Les standards ne servent-ils qu’à protéger l’organisme et lui permettre de blâmer l’instructeur sans chercher à savoir ce qui s’est passé ?
Si les faits ci-dessus sont avérés – et ils sont vérifiables – alors l’industrie de la plongée est tombée à un niveau honteux et vil qui contribuera à saper nos intérêts collectifs et nos modèles relationnels en affaires dans le monde du sport qu’est la plongée.
Je regrette d’avoir à écrire cette lettre, je le regrette très sincèrement et je sais que certains vont me vilipender et me ridiculiser pour avoir soulevé le problème mais il serait irresponsable de ma part de ne pas lancer un débat dont nous avons tous grand besoin. Combien de temps cela prendra-t-il avant que nous ne détruisions cette industrie de la plongée de l’intérieur ? J’adore la plongée et tous les chaînons de la chaîne. Je regrette que certains ne partagent pas ma passion à la défendre. Je souhaiterais tant débattre ouvertement à ce sujet avec tous, dirigeants d’organismes de formation, fabricants et tous les autres professionnels de cette industrie.
Il est grand temps que nous agissions tous de façon responsable et que nous travaillions main dans la main. Et si un fabricant, un organisme de formation ou tout autre professionnel s’y refuse, alors… allez dépenser votre argent ailleurs. Car parfois, au bout du compte, le changement se produit ou ne se produit pas en fonction de vos investissements. Autant laisser votre argent dormir à la banque.
Tout est fonction de votre éthique, en fin de compte. C’est vous qui décidez de la route à suivre. Pour moi, tout est clair et basé sur du bon sens. Et c’est la route à prendre.
Bien sincèrement,
Brian Carney ->Brian.Carney@tdisdi.com
Pour de plus amples renseignements et pour vérifier les références ci-dessus, aller à www.pacer.gov et suivre Tuvell v Boy Scouts of America, et al, Cas 1 : 12-cv-00128-DB United States District Court for the Northern District of Utah.
Consulter la lettre originale : LETTRE OUVERTE DE BRIAN CARNEY
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Merci GERALDINE pour ce billet…
On est bien toujours dans la bataille et le militantisme contre cette captivité qu’on ne peut accepter…
C’est toujours un plaisir de te lire.
Bonne continuation GERALDINE.
SB