Plonger du côté obscure du dipôle de l’océan Indien…

Les aléas climatiques des voyages de plongée

En tant que plongeurs, nous sommes souvent dépendants des caprices de la météo et de l’océan. Réserver des vacances de plongée des mois à l’avance implique généralement de se renseigner sur les saisons et conditions météorologiques de la région en question à cette période. Seulement, la nature sera toujours plus forte que toutes les technologies que l’homme peut mettre en place. Ce fut le cas cette année dans certaines régions d’Asie du Sud Est, y compris dans l’Archipel de Mergui au Myanmar (Birmanie). Habituellement, planifier son voyage entre novembre et avril permet d’éviter la mousson et les saisons chaudes et de profiter des conditions optimales pour la plongée. Cependant, en ce début d’année 2020, un phénomène climatologique connu sous le nom de dipôle de l’océan Indien a déjoué les plans de nombreux plongeurs dans cette partie du monde.

Photo de Franck Fogarolo

Dipôle de l’Océan Indien:

Niché entre l’Asie, l’Afrique et l’Australie, l’océan Indien, subit chaque année des changements de températures de surface dus au phénomène de dipôle. Cette oscillation, découverte en 1999 par des chercheurs en climatologie, se compose de 3 phases alternatives distinctes qui se répètent tous les 3 à 5 ans. Ces phases affectent les systèmes météorologiques des terres environnantes et des masses d’eau de différentes manières. Les phases neutres entraînent l’eau chaude de l’océan Pacifique jusqu’à l’Indonésie, tandis que les vents d’Ouest, le long de l’équateur, la maintiennent à des températures relativement normales lorsqu’elle traverse les mers tropicales. Les phases positives et négatives tendent quant à elles à créer un gradient de températures dans l’océan. Ainsi, elles affectent les températures de surface et les précipitations de chaque côté de cette vaste étendue d’eau.

Cette année, nous avons connu une phase positive particulièrement forte et, inédite ces six dernières décennies ! Les vents d’ouest plus faibles, ont causé un déplacement des eaux chaudes du côté ouest de l’océan Indien, ce qui a eu pour conséquences d’entraîner peu de précipitations et la remonté des eaux froides des profondeurs de la côte ouest de la Thaïlande, du Myanmar et des mers environnantes.

Photo de Franck Fogarolo

“ Nous n’avons jamais eu une eau si froide en 9 ans ” déclare Franck Fogarolo, propriétaire de The Smiling Seahorse, un expert de la plongée au Myanmar (Birmanie) depuis 2012. Avec des températures basses atteignant seulement 20°C sur certaines plongées, les guides ont même équipé le bateau de shorty supplémentaires qu’ils ont proposés aux plongeurs en plus de leurs longues combinaisons.

Des rencontres inoubliables:

Bien qu’un peu froide, l’eau fraîche a permis aux plongeurs de cette saison de voir des espèces assez spéciales. Celle-ci en apportant beaucoup de nutriments aux zones peu profondes accessibles aux plongeurs a attiré beaucoup de vie marine généralement peu visible dans les 30 premiers mètres. « Nous avons vus plus de 40 guitares de mer (raies-guitares) lors d’une seule plongée à Black Rock en Mars 2020 », nous a confié Franck avec enthousiasme.

Photo de Franck Fogarolo

La saison dernière, nous avons eu la chance de faire des rencontres originales telles qu’un Requin Pointe Blanche, des guitares de mer (aussi connu sous le nom de raie à museau long en pelle) ou des dragons de mer (pégases ou pegasidae) spéciaux. Bien que cette saison ne soit pas représentative des conditions habituelles de plongée dans l’Archipel de Mergui, nous avons pris beaucoup de plaisir. Nous attendons tout de même, avec impatience, le retour de conditions optimales pour les saisons à venir.Les experts affirment que sur une période moyenne de 30 ans, l’océan subirait environ 4 phases positives et 4 phases négatives, chacune pendant une durée d’environ 6 mois. Les modèles suggèrent aussi que plusieurs phases positives consécutives ne pourraient se produire que deux fois tous les 1000 ans. Cette dernière saison nous a peut-être apporté des conditions rares tel qu’une eau froide, une mauvaise visibilité et de fortes thermoclines, mais nous pouvons maintenant nous attendre à des eaux chaudes et claires pour les 10 prochaines années.

Photo de Franck Fogarolo

Informations sur l’archipel Mergui:

Situé au large des côtes du Myanmar (Birmanie), l’Archipel Mergui se compose de plus de 800 îles, pour la plupart inhabitées, sur un périmètre de plus de 36 000 mètres carrés. Le MV Smiling Seahorse, nouveau bateau de croisière lancé en Novembre 2018, peut mener jusqu’à 16 plongeurs dans certains des sites de plongée les plus inexplorés d’Asie du Sud-Est. Peu connu de la plupart des voyageurs et exploré par quelques privilégiés depuis 1997, ce paradis des plongeurs est uniquement accessible par bateau.

Photo de Franck Fogarolo

Photo de Franck Fogarolo

Camille et Franck Fogarolo vivent en Thaïlande. Ils offrent des croisières de plongée dans la région du Myanmar depuis 2012. Avec leur équipe, entre deux croisières, ils écrivent régulièrement des blogs sur leur site “The Smiling Seahorse“. Cette destination encore méconnue est le must de la plongée dans la région.