Où dans le monde pouvez-vous espérer nager avec un requin-baleine à l’heure du déjeuner puis regarder les éléphants jouer dans l’eau et les lions se prélasser à l’ombre le lendemain matin ? En Tanzanie, à l’Est de l’Afrique, en poussant vers l’archipel de Zanzibar. Certes, c’est un long voyage, mais bon sang ça vaut le coup !
A l’Est de Dar-Es-Salam, le point d’entrée du pays, on trouve les îles épicées de l’archipel de Zanzibar, composé en fait d’Unguja, la plus animée (souvent appelée à tort Zanzibar), et de Pemba, plus calme et plus vallonnée. Et plein sud se trouve l’île très plate et bien peu peuplée de Mafia, qui abrite le Parc Marin du même nom.
L’ILE D’UNGUJA
Il faut à peine quinze minutes de vol pour rejoindre Stone Town, la capitale de Zanzibar, à partir de Dar es Salam. Ancienne plaque tournante de la traite négrière en Afrique de l’Est, on peut encore y découvrir l’ancien marché aux esclaves, mais aussi des bains persans, les gigantesques portes en bois de la ville, dans un labyrinthe de ruelles étroites. Et d’innombrables restaurants, dont le Mercury, puisque c’est dans cette ville qu’est né le célèbre chanteur de Queen !
Mais je suis là pour plonger, je renonce aux attractions de Stone Town, et je file vers le centre de plongée pour ne pas louper la plongée du matin : 30 minutes plus tard, j’ai contourné le nord de l’île sur un clapot léger, et rejoint l’atoll Mnemba. Un récif corallien peu profond, avec une île minuscule en forme de cœur sur sa frange occidentale, entouré de tombants abrupts.
Et c’est un must à Unguja : la visibilité dépasse 20 mètres, les sites sont nombreux, et le calme du lagon permet aux plongeurs expérimentés mais aussi aux débutants de plonger en toute sécurité.
DES SITES POUR TOUS LES NIVEAUX
Nous nous mettons à l’eau sur Wattabomi, dans le chenal qui sépare l’atoll de l’île principale, dans un lacis de coraux envahis de poissons. Nous rencontrons trois tortues vertes en train de faire une sieste la tête dans une crevasse, avant de remonter au dessus d’une langue de sable faire notre palier, pendant que des centaines d’anguilles de jardin se balancent doucement, comme s’il y avait à côté un charmeur de serpents invisible.
West Bank est un autre bon site, qui débute à six mètres seulement sous la surface pour se poursuivre par un tombant de 40 mètres : couvert de poissons de récifs, de coraux durs et d’alcyonaires, et d’immenses bancs de fusiliers. On y découvre aussi un étonnant juvénile de vivaneau noir, des poissons demoiselles dans des coraux corne de cerf, des poissons-anges royaux et empereurs, des chromis bicolores, des raies à points bleus et des poissons-clowns à deux bandes. Le site peut être parfois trop fréquenté, rarement par d’autres plongeurs mais par de nombreux snorkelers qui peuvent gâcher cette impression d’avoir rendez-vous en privé avec les poissons !
DES ESPECES ENCORE JAMAIS DECRITES
Mais d’autres sites sont plus calmes, comme les récifs de Kichafi et Haji, et leurs vastes formations de coraux enchevêtrés, des squilles multicolores, des anémones magnifiques où s’abritent des clowns moufette et des poissons-feuilles ; mais aussi Nankivell, avec ses immenses colonies coralliennes aux formes fascinantes, ses raies, ses mérous de bonne taille ; ou encore Hunga, avec ses patates qui se rejoignent et évoquent un monde fantastique, et sa monstrueuse langouste cachée dans une grotte et qui ne laisse dépasser que ses gigantesques antennes. Hunga abrite aussi des bancs encore plus gros de vivaneaux, et d’impressionnants et nombreux crocodiles à tête plate.
Parmi mes trouvailles, à dix minutes à peine du Centre de Plongée, des hippocampes, un poisson scorpion mauricien, et un poisson scorpion feuillu. Ce jour là la visibilité n’est pas bonne, à peine 10 mètres, mais c’est une excuse pour partir en quête de macro, et je ne suis pas déçu : je tombe sur une crevette nettoyeuse pratiquement translucide, encore jamais décrite !
L’ILE DE PEMBA
Il faut à peine trente minutes de vol au dessus de l’atoll de Mnemba et de ses îles inhabitées, avant de se poser à l’aéroport un peu délabré de Chake Chake, la ville de Pemba, sur la côte Ouest bordée de mangrove. Et malgré de nombreux attraits, forêt primaire, oiseaux endémiques, plages désertes et certains des plus beaux sites de plongée de l’Océan Indien, Pemba accueille rarement plus d’une centaine de touristes à la fois ! Chake Chake possède l’unique distributeur bancaire de l’île, et est son principal cœur économique, mais ne vous attendez pas à trouver un supermarché. Il y a quelques rues étroites bordées de petites boutiques, beaucoup vendent et fabriquent des khangas (le sarong local), on y trouve aussi des marchands de nourriture à emporter, des brochettes de viande moelleuses et des frites bien grasses. Il y a aussi un marché avec des produits frais. L’absence de tourisme et le peu d’habitation sur les côtes ont contribué à maintenir les récifs de Pemba en bon état. Durant l’hiver austral, quand l’eau plus froide remonte dans le chenal profond qui sépare l’île du continent, il y a beaucoup de coureurs-arc-en-ciel, de carangues, d’espadons voiliers, de thons albacores, de carangues pilotes, et de carangues gros yeux.
AVEC LE PIONNIER DE LA PLONGEE SUR PEMBA
Divers swahili et le Kervan Saray Beach Eco-resort sur la côte nord-ouest sont gérés par Farhat Jah, un mélange étonnant de turc et d’indien avec une éducation britannique, et son épouse néerlandaise, Cisca. C’est d’un bon rapport qualité-prix, avec des chambres à deux lits et des chambres doubles, et des repas sains et copieux, une cuisine locale préparée avec amour sur le poele à charbon. Et tandis que nous filons vers Deep Freeze sur une mer parfaitement plate, Raf, c’est ainsi que l’on surnomme le maître de maison, me régale de dix ans d’histoires sur Pemba : il est le pionnier de la plongée sur l’île, et a découvert et baptisé lui-même la plupart des sites. Sa connaissance des récifs, de la météo, ses années d’expérience et sa passion pour la photo et la vidéo lui permettent de vous donner une foule de conseils, si toutefois vous arrivez à suivre son débit de parole !
DANS LE BLEU LE PLUS BLEU
Et tandis que je m’équipe, je vois parfaitement les tables de corail qui se trouvent une vingtaine de mètres plus bas. Je me mets à l’eau, waouw ! D’un côté, un mur, comme le sommet d’une montagne submergée, couvert de coraux durs et d’alcyonaires de toutes sortes, débordant littéralement de poissons. Et de l’autre, le bleu le plus bleu, une visibilité parfaite, le regard qui s’enfonce loin, tout en bas, de plus en plus bas ! Je suis sans voix.
Après un en-cas de crêpes encore chaudes pris sur une petite île de coraux fossilisés et de sable blanc, nous mettons le cap sur un autre site, Bunker Slobodan, que l’on pourrait décrire comme une main écartée, avec entre chaque doigt des failles débordantes de vie.
Les jours suivants, j’aurai aussi la chance de croiser une manta magnifique, un grand banc de barracudas, des napoléons, des snappers….autant de plongées extraordinaires entrecoupées de pique-niques sur des îles de sable blanc, baignées dans des eaux d’émeraude sous un ciel sans nuages…L’éloignement de l’île, la virginité des sites me portent à rêver, je me sentirais presque la réincarnation du Commandant Cousteau ! Mais il est temps de repartir, Mafia m’attend !
L’ILE DE MAFIA
L’île de Mafia se trouve à 30 minutes au sud-ouest de Dar-es-Salaam en avion de tourisme et possède deux attractions principales: plonger avec les requins baleines au large de Kilidoni, sur la côte Est, de décembre à mars, et plonger sur les récifs extérieurs de la côte Ouest, dans les passes de la baie de Chole, où sont installés plusieurs centres de plongée.
Kinasi Lodge a ma préférence, avec une belle piscine et une plage magnifique, des chambres bien aménagées, et une cuisine à la fois gastronomique et copieuse. Le propriétaire, Peter Byrne, est un écologiste convaincu et le lodge utilise l’énergie solaire pour chauffer l’eau, le biogaz, le compostage, et recycle les eaux usées. Avec seulement 13 suites, réparties sur un grand terrain, il est facile de se détendre et de se sentir choyé ! Et pour ceux qui voudraient se faire dorloter, il y a un spa et un centre de massage sur place. En terme de rapport luxe-prix, Kinasi Lodge est certainement le meilleur endroit que je connaisse ! On plonge à partir d’un boutre traditionnel en bois équipé de moteurs hors-bord. Le départ a lieu après le petit-déjeuner, et l’on déjeune généralement à bord entre les deux plongées, sauf si la marée impose un départ très matinal : dans ce cas, on prend un gros encas entre les deux plongées, et l’on déjeune vraiment un peu plus tard, de retour au lodge.
PLONGEE DANS LES PASSES
La passe de Kinasi, si on la compare aux eaux de Pemba, est moins riche en coraux, mais la quantité de poissons y est surprenante, vivaneaux, murènes, bancs de barracudas, gros mérous. Une richesse due aux marées qui renouvellent l’eau toutes les douze heures, chargée d’éléments nutritifs. On plonge donc à l’étale, pour avoir une bonne visibilité et éviter le courant.
Sur les récifs extérieurs de la passe, vers le nord, on trouve les grottes de Dindini, une série de surplombs creusés dans la paroi, entre six et une trentaine de mètres. La visibilité excède les 20 mètres, et les cavités servent de tanières à de gros mérous patates. Ces petites bêtes peuvent mesurer près de deux mètres et peser 200 kilos, et se montrent souvent curieux ! Deux fois, ils sont venus se faire tirer le portrait et ne semblaient pas du tout dérangés par ma présence. On trouve aussi sur les parois beaucoup de coraux-fouets habités par des gobies.
Les sites des passes de Gina et Juani sont quant à eux couverts de coraux mous violets et roses, fréquentés par des bancs de vivaneaux à raies bleues, à cinq bandes, du Bengale, et sont d’excellents endroits pour rencontrer des tortues.
CAP SUR LES REQUINS BALEINES
Pour ma dernière journée nous nous sommes dirigés vers la côte ouest car c’était la saison des requins baleine. Entre la fin novembre et mars, le bloom planctonique attire dans le chenal entre l’île et l’estuaire de la rivière Rufiji les plus grosses espèces de poissons. Une fois repéré en surface, le skipper nous a mis sur sa route et nous avons glissé à l’eau. Nageant à côté d’un mâle de quatre mètres cinquante, je déclenche un peu au hasard, la lumière du soleil m’empêchant d’y voir correctement, pour essayer de photographier le poisson-pilote qui le précède ! Quand il poursuit sa route, le bateau vient nous chercher et nous recommençons un peu plus loin : en tout ce jour là, nous en avons vu cinq ou six, et pendant les quelques minutes où aucun d’entre eux n’était en vue, une raie manta est venue tourner et faire des loopings, au cas où je me serais ennuyé ! Fantastique !
UN MOT SUR LES SAFARIS TERRESTRES
La Tanzanie, c’est aussi le célèbre et inoubliable cratère du Ngorongoro, le Serengeti et ses migrations massives, la zone moins connue mais très aréable de Manyara et le Tarangire National Parks. Le premier est classé réserve de biosphère par l’UNESCO, et le lac abrite d’énormes troupeaux de flamants roses et de pélicans, mais aussi les fameux arbres que les lions escaladent, d’énormes baobabs, des troupeaux d’éléphants, et plus de 500 espèces d’oiseaux. Le cratère du Ngorongoro est également le seul endroit où l’on peut voir des rhinocéros noirs en Tanzanie.
Plus au Sud, on trouve le Parc National de Mikumi, le plus grand du continent, parsemé de gigantesques baobabs, et traversé par la rivière Ruaha, connue pour son exceptionnelle population d’éléphants, ses immenses troupeaux de buffles, et autres mammifères d’Afrique. Des randonnées avec ânes de portage sont également possibles à travers les hauts plateaux du Ngorongoro jusqu’au splendide lac Natron et ses flamants roses, en passant par les gorges d’Olduvai, où un fossile d’hominidé d’1,8 millions années a été découvert, ou encore Ol Doinyo Lengai, un volcan actif à 2878 mètres… Et bien sûr il y a la montée vers Uhuru Peak, le point le plus élevé sur le continent au sommet du mont Kilimandjaro.
Que vous soyez un plongeur qui a envie de passer quelques jours en safari, ou un accro des safaris qui a envie de passer quelques jours à plonger, la Tanzanie et ses îles a beaucoup à offrir, et la qualité des liaisons aériennes permet de se déplacer en un clin d’œil. Et si comme moi vous êtes fan des deux, c’est un rêve qui devient réalité. En fait, j’y suis déjà allé sept fois, et mon prochain voyage est déjà programmé…
CONTACTS ET PRIX
- UNGUJA Café Stone Town propose des chambres doubles à 90 USD la nuit, L'Hôtel Tembo, sur la plage, à 130 USD et le somptueux Serena Inn à partir de 285 USD. Sur la grande plage de Kendwa, on peut citer par exemple Sunset Bungalows, à côté du Scuba-Do Dive Center (65 USD pour une chambre double avec salle de bains, 98 USD pour un bungalow sur la plage avec air conditionné). Package de 10 plongées avec location de matériel complet pendant cinq jours à 575 USD. - PEMBA Kervan Saray Beach / Swahili Divers propose une pension complète à partir de 100 $ US par personne et par nuit, et un forfait six nuits en pension complète et 10 plongées à partir de 1250 $. - MAFIA Kinasi Lodge propose la pension complète pour 170 $ USD par personne et par nuit, et un package de 10 plongées pour 480 $ USD. Les frais de parc sont $ 20 USD par personne et par nuit. Plongée requin baleine : 60 $ USD par personne. Vols intérieurs : Avec Zanair : de Dar à Stone Town, 80 $ USD, de Stone Town à Pemba, 101 $ USD, de Dar à Pemba, 140 $ USD. Avec Coastal Aviation : de Dar à Mafia, 120 $ USD et de Stone Town à Mafia (via Dar) , 150 USD. Safaris Il y a des centaines de compagnies de safari en Tanzanie, mais Kervan Saray peut organiser des safaris à travers des opérateurs de confiance tels que Indigo Safaris. Selon l'endroit où vous souhaitez aller, vous pouvez aussi contacter directement Christopher Bartlett à travers sa page profil.
Texte et photos : Christopher Bartlett – http://www.bartlettimages.com/
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Excellente idée !