Les Émirats arabes unis évoquent généralement des images de célébrités, de voitures de luxe et de gratte-ciel imposants. Mais rares sont ceux qui pensent à la richesse de sa flore et de sa faune. Pourtant, la région est un trésor aussi bien sur terre que sous les eaux. En tant que témoin privilégié, ayant posé mes palmes ici en 1986 et plongé dans ces eaux depuis 1992, je peux témoigner de la splendeur d’autrefois de ces écosystèmes . Bien que la biodiversité sous-marine ait été affectée au fil des années dans tout le moyen orient, les Émirats ont entrepris des initiatives audacieuses pour préserver leur environnement. Avec la COP 28 à venir, de nouvelles mesures prometteuses pourraient être mises en place.
Le premier Sommet des Océan du Moyen-Orient
Le mois dernier, Dubaï a accueilli le tout premier sommet du Moyen-Orient dédié aux océans organisé par Goumbook. Des experts renommés du monde entier se sont réunis pour discuter des défis à venir dans la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord). Malgré les habitudes de consommation parfois critiquées dans la région, il est crucial d’agir et de tirer parti des opportunités de conservation pour avoir un impact positif. La région marine se divise en trois habitats distincts : les récifs coralliens, les herbiers et les mangroves. Si les mangroves et les herbiers sont relativement préservés, les récifs coralliens connaissent des difficultés.
Un projet de Réhabilitation des tortues
Le golfe a connu une modernisation rapide, mais leur mer reste résiliente. Bien que la population de tortues vertes soit en croissance, la situation est différente pour les tortues imbriquées, classées parmi les espèces les plus vulnérables de la CITES.
Le projet de réhabilitation des tortues, connu sous le nom de “Turtle Rehabilitation Centre“, est financé par le groupe hôtelier Jumeirah et dirigé par le Dr Barbara Leng-langton. Il offre des soins de première qualité aux tortues en détresse, ainsi qu’un séjour gratuit dans les lagons d’un hôtel 5 étoiles avant de les relâcher dans leur milieu naturel. Grâce à des balises GPS, les mouvements des tortues peuvent être suivis et analysés. Le centre relâche régulièrement les tortues lorsque leur état de santé le permet. Cette initiative franchit une nouvelle étape avec la création de plusieurs centres supplémentaires à des emplacements stratégiques à travers le pays.
Un numéro d’appel centralisé, le 800-turtle, permet de signaler toute tortue en danger, déclenchant ainsi une intervention des secours spécialisés.
Un Projet de restauration de récifs
Lors du sommet, j’ai eu le privilège de découvrir l’équipe d’Archireef et son projet novateur. Cette start-up se spécialise dans la restauration des récifs coralliens grâce à des assiettes en céramique imprimées en 3D. Ces assiettes, poreuses, fournissent un environnement propice au développement des polypes de corail. Récemment, elles ont été installées au large de l’île de Delma, près d’Abu Dhabi. J’ai également participé à un bio-blitz organisé par Archireef depuis l’île de Sir Bani Yas, avec l’autorisation de l’Agence pour l’environnement. Cette opération de science participative permet de recenser et cataloguer la biodiversité marine sur une période courte mais intense. Les résultats obtenus sont essentiels pour évaluer l’état de santé général des différents habitats sous-marins de la région.
Vriko Yu, fondatrice et PDG d’Archireef, souligne l’importance de comprendre la biodiversité existante pour avoir un impact positif sur l’écosystème marin. Elle estime que cela facilitera l’élaboration de nouvelles réglementations et encouragera d’autres entreprises du secteur privé à adopter des modèles d’entreprise intégrant la nécessité de restaurer et de protéger la nature.
Malgré quelques coraux résistants à la chaleur, la plupart des récifs coralliens de la région sont aujourd’hui recouverts d’algues, donnant une impression de ville fantôme abandonnée. Bien que l’on puisse encore admirer de majestueux mérous, il est alarmant de constater l’absence de requins, de raies, de murènes et de poissons-scorpions. Les mérous, désormais en grande partie en tête de la chaîne alimentaire
malgré les coraux résilients à la chaleur, les récifs coralliens de la région sont largement envahis par les algues, rappelant une triste image de ville fantôme abandonnée. Bien que des mérous imposants puissent encore être observés, il est alarmant de constater l’absence de requins, de raies, de murènes et de poissons-scorpions. Les mérous, désormais au sommet de la chaîne alimentaire, ne sont plus confrontés à leurs prédateurs naturels.
En outre, j’ai eu la chance d’assister au déploiement des Autonomous Reef Monitoring Structures (ARMS). Ces plaques en plastique ancrées dans le sol permettent de surveiller les différents types de polypes de corail qui s’installent entre elles dans des endroits spécifiques, offrant ainsi une meilleure compréhension de l’écosystème corallien.
Pour Conclure
Lors de ce sommet, j’ai également eu des rencontres fascinantes avec divers experts, tels que des spécialistes de l’aquaculture en Iran, une plongeuse-blogueuse engagée et même un aventurier britannique qui a traversé l’Atlantique en ramant pour sensibiliser à la pollution plastique.
Il est légitime de se demander si tout cela ne relève pas du greenwashing, cette tendance à donner une image écologique trompeuse. Cependant, l’atmosphère du sommet ou du Bio-blitz ne laissait aucune place au doute. J’ai été frappé par le nombre de personnes bienveillantes et passionnées que j’ai rencontrées, qu’il s’agisse de scientifiques dévoués à leur domaine ou d’amoureux des océans. Il est important de replacer les choses dans leur contexte : la région du Golfe fait face à d’importants défis environnementaux, et il serait simpliste de sous-estimer l’importance d’agir dans cette région en raison de sa richesse. Au-delà des clichés et des influenceurs agaçants, la véritable réalité réside dans les actions des pionniers qui s’efforcent de faire une réelle différence pour l’écologie du pays.
Photos et article de Christophe Chellapermal